L'existence confronte à des difficultés, des conflits et des frustrations qui provoquent parfois tristesse, découragement et lassitude. Ces épisodes peuvent faire évoquer à tort une dépression. Le soutien de proches ou de soignants aide à surmonter cette tristesse, cette "déprime", sans qu'il soit nécessaire de recourir à un médicament antidépresseur. Cependant, la frontière entre "déprime" et dépression n'est pas toujours nette.
La dépression, ce n'est pas un "mal être" existentiel, ni un "coup de déprime"
Le fait de se sentir triste, d'être "déprimé", d'avoir des "idées noires" ou des difficultés à dormir ne veut pas forcément dire que l'on souffre de dépression. Les moments de cafard, de "blues", de doute ou de questionnement font partie de la vie. Au fil du temps et des évènements, chacun de nous expérimente toute une gamme de sentiments, du plus triste au plus optimiste. A l'intérieur de cette large palette d'émotions, la tristesse, le découragement et le désespoir représentent des expériences humaines normales. Ces variations et ces baisses de l'humeur ne doivent pas être confondues avec ce qu'éprouve une personne dépressive.
La dépression est une maladie qui peut toucher chacun d'entre nous (quel que soit son âge, son sexe, son niveau social...). Contrairement à certaines idées reçues, elle ne relève ni d'une" fatalité", ni d'une faiblesse de caractère.
La volonté seule ne suffit pas pour en sortir, notamment parce que la maladie provoque un sentiment de dévalorisation de soi et des pensées négatives. Elle entraîne une souffrance et une gêne importantes, elle peut prendre plusieurs formes et a des causes multiples. Elle nécessite une prise en charge par un professionnel compétent.
Pour employer le terme "dépression", il faut, pendant au moins 15 jours et de façon (quasi) permanente avoir :
une tristesse et une souffrance inhabituelles, plus douloureuses que tout ce qu'on a ressenti avant,
une perte d'intérêt et de plaisir pour la plupart des choses ;
plusieurs symptômes en même temps (voir ci-dessous) qui entravent douloureusement la vie quotidienne.
Les symptômes (signes) de la dépression peuvent être :
affectifs : tristesse intense, anxiété, incapacité à éprouver du plaisir...
intellectuels : difficulté à se concentrer, dévalorisation de soi, pensées négatives...
physiques : fatigue, ralentissement des gestes, de la parole...
corporels : altération du sommeil et de l'appétit, problèmes sexuels...
En fonction du nombre et de l'intensité de ces symptômes, la dépression sera plus ou moins sévère, la vie quotidienne plus ou moins perturbée.
"La dépression est la première cause de suicide : près de 70% des personnes qui décèdent par suicide souffraient d'une dépression, le plus souvent non diagnostiquée ou non traitée."
Les idées de suicide sont fréquentes dans la dépression (elles font d'ailleurs partie des symptômes de la maladie), elles méritent dans tous les cas d'être signalées à un professionnel de santé afin d'en parler et de les désamorcer.
Il est important de savoir que les personnes suicidaires ne veulent pas nécessairement mourir, mais souhaitent avant tout mettre fin à une souffrance devenue insupportable. Aussi, la majorité des personnes ayant des idées de suicide ne feront pas de tentative.
En cas d'idées suicidaires, n'hésitez pas à chercher de l'aide auprès de proches ou d'écoutants formés.
Vous pouvez aussi consulter ma page dédiée au risque suicidaire pour en savoir plus.
La dépression se manifeste le plus souvent sous forme d'épisode(s) : on parle alors d'épisode dépressif caractérisé (ou d'épisode dépressif majeur). L'épisode dépressif peut être plus ou moins sévère, les incapacités et les perturbations relationnelles, professionnelles et sociales sont nombreuses. Dans les cas extrêmes, la personne ne parvient plus à prendre soin d'elle-même (se nourrir, s'habiller seule, conserver un minimum d'hygiène personnelle...) ou peut tenter de mettre fin à ses jours.
La durée de l'épisode dépressif est variable. Elle peut aller de quelques semaines à plusieurs mois, voire plusieurs années. La plupart des épisodes dépressifs durent moins de six mois.
Une guérison totale et durable est possible mais le risque de rechute est important. Cependant, lorsque la personne bénéficie de traitements et d'un suivi adéquats, le risque de réapparition des symptômes et la souffrance sont largement diminués. D'où l'intérêt d'une prise en charge précoce de la maladie.
On parle de troubles récurrents lorsque plusieurs épisodes dépressifs surviennent en l'absence d'épisodes distincts d'excitation (trouble bipolaire). Chaque épisode a une durée moyenne de six mois à un an.
Si la dépression est traitée, l'épisode est plus court et évolue vers la disparition de l'ensemble des symptômes ou la persistance de quelques symptômes résiduels.
Cyclothymie : périodes de dépression et d'excitation légères en alternance. Souvent ces variations de l'humeur restent méconnues, limitées à des variations périodiques d'activité, de confiance en soi, de sociabilité ou des intérêts.
Dysthymie : dépression mineure chronique. Les personnes sont la plupart du temps tristes, moroses, manquent d'enthousiasme et d'énergie, se sentent au bout du rouleau et ont peu d'espoir d'amélioration.
Dépression du post-partum : quelques semaines après un accouchement. Se caractérisent par des craintes de mal s'occuper de son enfant, des projets de suicide impliquant mère, enfant, voire les autres enfants de la fratrie. A ne pas confondre avec le "baby-blues" survenant au 3ème jour après l'accouchement (humeur désagréable, anxiété, irritabilité, tristesse, hypersensibilité aux critiques, craintes pour la santé de l'enfant et doutes sur sa propre capacité à pouvoir élever un enfant).
Dépression et schizophrénie : certaines dépressions surviennent lors d'une augmentation des symptômes chez une personne atteinte de schizophrénie.
Dépression et grand âge : contrairement aux idées reçues, la dépression n'est pas une fatalité pour la personne âgée. Avec l'âge, la dépression peut se manifester par des plaintes et des douleurs somatiques, un changement de comportement, avec un sentiment de vécu hostile et de l'agressivité.
Dépression et pathologie vasculaire : le risque de dépression peut être augmenté par certains facteurs de risque cardio-vasculaire : hypertension artérielle, hypercholestérolémie ou diabète. Les dépressions dites vasculaires se caractériseraient par une apparition relativement tardive, une perte d'énergie et d'initiative, un ralentissement et une moins bonne réponse aux antidépresseurs.
Troubles dépressifs provoqués ou aggravés par des médicaments
La dépression peut avoir des liens avec d'autres maladies, psychologiques ou physiques. Il peut notamment s'agir de troubles anxieux, d'alcoolisme, de dépendance à certains médicaments (anxiolytiques et hypnotiques) ou d'abus de substances psychotropes (cannabis, ecstasy, cocaïne...). Les personnes souffrant de dépression peuvent être tentées d'abuser de ces substances pour apaiser leur angoisse.
Par ailleurs, l'association d'un trouble dépressif à une maladie physique grave ou chronique (diabète, cancer, accident vasculaire cérébral...) peut rendre l'identification et le traitement de la dépression plus difficile.
Dans cette partie, vous trouverez des réponses aux questions que vous vous posez sur la psychothérapie et sur les médicaments. Il existe aujourd'hui des traitements efficaces, souvent complémentaires, adaptés à chaque personne et à l'intensité de sa maladie.
Quel que soit le traitement, sa mise en œuvre s'appuie toujours sur une alliance, un dialogue, une collaboration étroite entre votre(vos) soignant(s) et vous. Vous avez le droit d'être informé, vous pouvez poser des questions à tout moment, exprimer vos attentes, vos craintes... Vous êtes acteur de votre traitement.
Le but du traitement de la dépression est de soulager la souffrance et la tristesse, de diminuer les conséquences physiques, psychiques et relationnelles, ainsi que le risque suicidaire. Une aide psychologique est un élément important du traitement. Elle suffit parfois à surmonter un épisode dépressif léger ou modéré. Les médicaments antidépresseurs sont à envisager en cas de dépression sévère ou prolongée.
La psychothérapie est un traitement à part entière de la dépression. De nombreuses études ont permis d'en prouver l'efficacité et d'en préciser les indications.
Pendant un épisode dépressif, la psychothérapie permet de mieux gérer la maladie, de réduire ses symptômes et leurs conséquences, de donner du sens à ce que l'on vit et de pouvoir envisager de nouveaux projets. Ses premiers effets (un soulagement lié à une écoute adaptée) peuvent se faire sentir immédiatement, les changements durables interviennent au bout de quelques semaines.
Après la guérison, la psychothérapie sert aussi à prévenir la réapparition des symptômes.
La psychothérapie est un traitement toujours pertinent en cas de dépression, quel que soit le type de dépression, son niveau de sévérité ou son ancienneté. Elle peut être utilisée seule (dans le cas d'épisodes dépressifs d'intensité légère) ou conjointement aux médicaments antidépresseurs ou à d'autres traitements. En cas de dépression sévère en phase active, un soutien psychologique sera proposé, mais le travail de psychothérapie ne pourra débuter qu'une fois l'intensité de la souffrance diminuée par le traitement médicamenteux.
Je vous recommande de consulter dans les meilleurs délais, afin d'éviter une persistance et une aggravation éventuelles de la maladie qui rendraient le traitement plus difficile, augmenteraient inutilement la souffrance et risqueraient de "chroniciser" les troubles (de les installer dans la durée).
Cependant, on ne "reçoit" pas une psychothérapie comme on peut "recevoir" des médicaments ! C'est la raison pour laquelle, même si celle-ci peut vous être recommandée (par votre médecin ou un autre professionnel de santé), un désir d'entreprendre ce travail psychologique est nécessaire pour commencer une psychothérapie.
La durée d'une psychothérapie de la dépression peut beaucoup varier en fonction du type de dépression, de sa sévérité et de la situation de la personne qui consulte.
Si 15 à 20 séances suffisent dans les situations "simples", un suivi plus long peut être nécessaire si la dépression est associée à d'autres difficultés. La fréquence des séances est généralement d'une par semaine, mais elle peut être plus ou moins élevée, selon les besoins et les phases de la psychothérapie. En cas d'épisodes dépressifs récurrents (répétés), le suivi psychothérapique peut être prolongé et les séances espacées ; cette psychothérapie au long court permet de diminuer le risque de réapparition des symptômes ainsi que leur intensité.
Le travail psychologique passe par un face-à-face avec soi-même, ses problèmes, ses émotions, sa souffrance ; on peut craindre que cette confrontation soit douloureuse et tenter de l'éviter. Les moments d'incertitude, les sentiments de plus grande vulnérabilité et le vécu d'émotions intenses sont en effet présents lors du processus de soin. Ils sont associés à de brèves épisodes de déstabilisation. Je peux alors vous proposer un soutien plus rapproché pour valoriser les efforts mis en œuvre, même si ces derniers ont pu conduire à une rechute momentanée.
La psychothérapie vise à la mise en place de changements durables. Or, tout changement suppose l'abandon d'habitudes et d'automatismes, ce qui n'est pas toujours évident à accepter. En réalité, les progrès de reconstruction, de reprise de confiance en soi et l'apaisement qui résultent du travail psychologique sont suffisamment importants et profonds pour percevoir que l'aventure de la psychothérapie en vaut la peine.
L'objectif du traitement par médicaments antidépresseurs est la réduction significative des symptômes dépressifs et de leurs conséquences dans la vie quotidienne. Ils améliorent les symptômes de la dépression à l'issue d'environ 3 à 4 semaines de traitement continu. Ils aident généralement à restaurer le fonctionnement normal du sommeil, de l'appétit, à retrouver l'initiative, une perception positive de la vie... Ce fonctionnement normal persiste après l'arrêt du traitement.
Contrairement à une idée reçue, ils ne créent pas de dépendance physique.
Il est indispensable de poursuivre le traitement pendant la phase de "consolidation" (4 à 6 mois)
La plupart des effets indésirables sont provisoires ou peuvent être corrigés. Parlez-en avec votre médecin.
L'arrêt du traitement doit toujours être progressif et préparé avec le médecin.
Dans certaines dépressions sévères avec risque suicidaire ou de traitements complexes nécessitant un suivi médical particulier, une hospitalisation en service de psychiatrie - parfois sans consentement- peut être décidée.
Dans tous les cas, la personne doit être informée de la raison médicale et être associée aux décisions la concernant.
Dans cette partie , vous trouverez les réponses les plus claires possibles aux principales questions que vous serez éventuellement amené à vous poser pour savoir où et à quels professionnels vous adresser. En effet, la prise en charge de la dépression est parfois complexe et fait appel à de multiples professionnels qui n'ont ni les mêmes compétences ni les mêmes qualifications.
Le médecin généraliste : c'est le premier interlocuteur pour les problèmes de santé. C'est souvent lui que l'on choisit comme médecin traitant. Il est conseillé de demander l'avis de son médecin habituel qui peut orienter vers une consultation ou un service spécialisés, en fonction de la gravité de la situation.
Le psychiatre : c'est un médecin spécialisé qui a reçu un enseignement supplémentaire sur les maladies mentales et leurs traitements. En tant que médecin, il est habilité à prescrire des médicaments, des examens de soins, et à rédiger des certificats médicaux.
Le médecin généraliste : il peut prescrire des médicaments et/ou orienter vers un spécialiste en santé mentale (psychiatre ou psychologue).
Le psychiatre : Il peut prescrire des médicaments et peut aussi proposer une psychothérapie (avec lui ou un autre professionnel).
Le psychologue : il peut proposer une psychothérapie mais ne peut pas prescrire de médicament (il n'est pas médecin).
"Le médecin généraliste, le psychiatre et le psychologue sont tenus au secret professionnel. Vous pouvez donc leur parler en toute confiance."
Dans les établissements publics : hôpitaux généraux ou spécialisés, Centres médico-psychologiques (CMP)... Ils sont organisés par "secteurs". Pour connaître le secteur dont vous dépendez, adressez-vous à l'hôpital le plus proche ou à la mairie.
Dans le secteur libéral : professionnels exerçant en cabinet (psychiatres, psychologues)
Dans les cliniques privées de santé mentale.
Quel que soit le lieu, les professionnels ont la même formation.
Si le recours au soin est indispensable en matière de dépression, il est également possible de "s'aider soi-même", de renforcer ainsi efficacité du traitement, d'accélérer la guérison et d'éviter la réapparition des symptômes.
Mais comment faire quand on souffre de dépression, quand -précisément du fait de cette maladie- on a plutôt tendance à perdre confiance en soi et à n'avoir plus envie de rien ? Voici quelques pistes de réponse...
Pour éviter une aggravation éventuelle de la maladie et une complication inutile du traitement.
Il est important de ne pas se laisser envahir par une mauvaise estime de soi ou par la crainte d'être jugé, que ce soit par ses proches ou par son médecin. Par son médecin en particulier, car cela pourrait conduire à lui dissimuler des informations importantes pour le diagnostic et pour les traitements.
On peut agir soi-même et réduire les symptômes de la dépression en pratiquant certaines activités physiques avec régularité et modération, en conservant une alimentation équilibrée, en limitant sa consommation d'alcool et en l'excluant complètement si l'on prend des médicaments, en gardant le contact avec les autres (famille, amis, confidents, collègues).
Un de vos proches souffre de dépression ? Cette expérience, si douloureuse pour lui, peut être également difficile à vivre pour vous, pour deux raisons principales :
la dépression est très difficile à comprendre, souvent perturbante et génératrice d'anxiété pour ceux qui ne l'ont pas vécue de l'intérieur ;
il s'agit pour vous de trouver votre "juste place" entre vos proches et son (ses) soignant(s)
Vous ne pouvez pas vous substituer au médecin ou au thérapeute de votre proche , mais vous avez un rôle essentiel dans le soutien que vous pouvez lui apporter :
en comprenant que la dépression est une maladie et en apprenant à détecter ses signes,
en aidant votre proche à consulter et à suivre un traitement approprié,
en le soutenant à "bonne distance" sans l'étouffer ni l'infantiliser,
en évoquant au besoin avec lui, pour mieux les prévenir, les éventuelles idées de suicide,
en prenant soin de vous-même pour que votre aide reste la plus efficace possible.